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Sorties

« Faux amis », une amitié balbutiante et indispensable

Dans une galerie parisienne, deux artistes israéliennes racontent les identités complexes et les préjugés.

Deux comédiennes entrent dans la galerie Mémoire de l’Avenir à Belleville et commencent à discuter. L’une en anglais, l’autre en français. C’est le début de la performance. Faux-amis/False friends c’est le récit réel d’une amitié qui débute par la perte d’un ordinateur portable.

Lilac 28 ans et Rony 25 ans, qui ont toutes les deux écrit les textes, sont devenues amies en Europe. Elles se connaissaient pourtant en Israël, leur pays d’origine, mais c’est ici qu’elles ont vraiment tissé des liens grâce à leur nouveau point commun : être étrangère dans leur pays de résidence. Rony en France, Lilac en Angleterre.

Lorsque Lilac va perdre son ordinateur à Londres, elle est désespérée. Elle va contacter Rony qui aura ces mots « I know what you’re going through. Come to Paris »  (« Je sais ce que tu ressens. Viens à Paris »). Elles vont alors se retrouver et partager sur leur sentiment de déracinement et la difficulté pragmatique de ne pas être européennes, avec notamment les problèmes de visa. C’est le début de l’histoire de cette performance et de leur histoire d’amitié.

Pendant plus d’une demi-heure, les deux comédiennes vont jouer leurs propres vies devant nous. Leurs interrogations sur l’identité, le sentiment d’appartenance, la solitude du déraciné, tout cela sera évoqué dans un mélange de dialogues, de monologues et d’enregistrements sonores de leurs propres voix. Nous assisterons aussi à une partie déroutante du jeu « Qui est ce ? ».

Après le show, Rony raconte une anecdote intégrée à la performance. Comme elle parle le français à la quasi-perfection, ses différents interlocuteurs essayent de la raccrocher à une identité française. « Mais tu es née en France ? », « Non » répond-t-elle toujours.

Et puis, un jour, quelqu’un parle de Jean-Jacques Goldman. Elle demande innocemment qui est cette personne. Les gens sont à la fois étonnés et « ils comprennent d’un coup », dit-elle. Non, effectivement, elle ne peut pas être française. Elle ne connaît pas Goldman, plus besoin de la questionner.

Maintenant, Rony connaît Goldman et mange même ses œufs à la coque. Pourtant, malgré le temps qui passe et l’impression de faire de plus en plus partie intégrante du pays, elle continue de se ressentir « étrangère ».

Elle explique être entrée dans une nouvelle étape vers une plus grande « intégration » grâce à son projet « IGLOU ». Il s’agit d’une plateforme artistique parisienne qu’elle a fondée, donc un moyen de s’enraciner encore un peu plus sur le territoire et dans la vie française.

Le premier événement d’IGLOU se tiendra au Pavillon des Canaux à Paris le 21 juillet. Il aura pour thème « premier séjour », un terme très difficile à traduire dans une autre langue. Un travail qualifié par Rony de « continuité nécessaire » à Faux amis/False friends.

Pour l’heure, la performance est suspendue et reprendra après l’été, car comme le souligne la comédienne de 25 ans, c’est une « performance consolante d’hiver ».

Retrouver le travail de Rony Efrat http://www.iglou.paris/ et celui de Lilac Yosiphon http://www.altheatheatre.co.uk/