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France

François Fillon à l’Arche : « Je veux redonner l’espoir aux Français et agir sur tous les plans »

Le candidat investi par les primaires de la droite et du centre aux présidentielles, ancien Premier ministre, s’exprime sur le vote à l’Unesco sur Jérusalem, sur l’affaire Meklat, le terrorisme islamiste, la sécurité, la laïcité.

 

L’Arche : Vous avez parlé à propos de la campagne d’un « climat de quasi-guerre civile » dont vous imputez la responsabilité au gouvernement. À quoi faites-vous référence ?

François Fillon : J’ai employé une expression forte pour réveiller le gouvernement. Des meetings sont systématiquement perturbés. À Nantes, des militants ont été attaqués avec violence. Dans certaines de nos cités des émeutes graves se sont déclenchées. Tout ceci alors même que nous sommes toujours en état d’urgence. Le gouvernement devrait taper du poing sur la table.

 

Vous n’avez pas été choqué quand la France s’est abstenue à l’Unesco sur une résolution portant sur la ville de Jérusalem et niant tout lien du peuple juif avec la ville sainte ?

J’ai été choqué et ai dénoncé cette réécriture de la réalité historique de Jérusalem dans une interview, en novembre 2016, quelques jours après l’adoption de cette résolution par le conseil exécutif de l’Unesco. Cet épisode illustre, selon moi, deux phénomènes. D’une part, l’amateurisme du gouvernement français actuel en matière de diplomatie. Quelques mois plus tôt, l’Unesco avait adopté une résolution similaire faisant mention des « fausses tombes juives » dans des cimetières musulmans de Jérusalem-Est et niant tout lien historique entre le peuple juif et ses deux sites les plus sacrés à Jérusalem. La France avait alors voté en sa faveur, décision que le président Hollande avait finalement désavouée en qualifiant ce vote de « fâcheux ». Je ne peux qu’exprimer mon trouble et mon indignation face à ce vote invraisemblable pour une résolution négationniste dictée par l’OCI : c’est une faute morale et une erreur politique qui affecte notre crédibilité. Ensuite, en octobre 2016, nous avons été incapables de nous opposer à ce nouveau texte, contrairement à nos partenaires allemands, américains et britanniques qui ont voté contre en commission. La conséquence a été une rupture complète des relations entre Israël et l’Unesco : brillant résultat ! Je m’opposerai toujours aux tentatives de délégitimisation d’Israël, la seule démocratie au Proche-Orient. Enfin, sur le conflit israélo-palestinien, je ferai tout pour faire émerger la solution des deux États, dans le respect absolu de la sécurité d’Israël et du droit des Palestiniens à vivre dans un État reconnu.

 

Que vous inspire cette affaire Mehdi Meklat, jeune écrivain issu des cités, encensé par certains médias, dont on a découvert qu’il abreuvait la toile de tweets antisémites très violents ?

Cette affaire est très grave. Elle montre qu’une partie de notre jeunesse, qui n’est plus celle habituelle de l’extrême droite, est rongée par l’antisémitisme. Dans les cités, il est souvent de bon ton de railler les juifs. La haine circule sur les réseaux sociaux. Et puis cette affaire illustre la négligence coupable d’une partie de nos médias et de nos élites culturelles face à la progression de l’antisémitisme en France. Au moment où le scandale était dévoilé, ils ont même parfois tenté de nier ou d’atténuer sa gravité par des arguments fallacieux. L’antisémitisme avance à petits pas, il commence par des petites blagues, suivies par des injures, puis finit par des agressions physiques dans la rue ou même à l’école. Je suis très inquiet devant cette décomposition de notre unité nationale, cette sorte de « tribalisation » de notre société où chacun se replie avec agressivité sur son identité, son origine, sa religion. C’est le contraire de la République et le contraire du patriotisme. On est tous Français !

Face à l’antisémitisme, nous devons être d’une fermeté extrême. Ce n’est pas un mal qui peut être combattu mollement, vaguement. La justice doit être nette et notre politique éducative très claire.

 

Dans votre livre, « Vaincre le totalitarisme islamique », vous évoquez les problèmes du terrorisme, de la sécurité, de la laïcité… sur lesquels vous allez mener bataille. Qu’est-ce qui va changer sur ce plan avec vous à la tête de l’État ?

Je suis le seul candidat à parler de « totalitarisme » à propos de l’islam radical. C’est en effet une idéologie comparable au nazisme et au stalinisme : elle prétend changer l’Homme par la coercition, abolir toute différence entre vie personnelle et vie publique, par une violence de type millénariste. Ce totalitarisme s’appuie sur une idéologie de fer et sur un projet expansionniste. Le terrorisme est un des moyens employés au nom de cette idéologie. Il ne faut pas confondre les deux, l’idée et le moyen, sinon on est certain de ne pas utiliser les bonnes armes pour les vaincre. J’agirai donc sur tous les plans pour assurer la sécurité, faire respecter une stricte laïcité, et combattre sans relâche toute manifestation de l’islamisme radical. Les terroristes se réclamant de l’État islamique doivent être poursuivis pour intelligence avec l’ennemi. Tout étranger proche des réseaux terroristes sera expulsé. Je veux un strict contrôle administratif du culte musulman, tant que son ancrage dans la République ne sera pas pleinement achevé, à l’exemple des autres religions. J’exigerai la dissolution immédiate de tous les mouvements qui se réclament du « salafisme » ou des Frères musulmans. Et je demanderai à nos concitoyens musulmans, que les intégristes essayent de prendre en otage dans leur foi et leur vie quotidienne, de nous aider à résister et à protéger la République. Enfin, je réorienterai notre politique étrangère vers la recherche d’alliances plus efficaces pour limiter l’essor de l’islamisme, qui s’étend aujourd’hui du Pakistan à l’Afrique Occidentale et représente une menace majeure pour le monde entier.

 

L’extrême-droite progresse un peu partout en Europe, en Hongrie, en Pologne, demain peut-être en France. Elle représente un danger d’abord pour la droite républicaine que vous représentez ?

Elle représente surtout un danger pour les peuples européens. La caractéristique de ces mouvements est d’exploiter les insatisfactions ou les peurs, souvent légitimes, des populations, pour proposer des recettes qui ne peuvent qu’exacerber les tensions sociales et aggraver les problèmes économiques. Pour riposter à l’extrémisme, la morale ne suffit pas. Il faut des actes pour changer puissamment les choses, sur l’emploi, sur l’insécurité, sur les flux migratoires, sur le fonctionnement de l’Europe…

Je ne confonds pas autorité et autoritarisme. Il faut réhabiliter l’autorité dans les domaines où, par laxisme, elle a été négligée alors même qu’elle est la condition nécessaire de toute vie en société. Je pense notamment à l’école et à l’ordre public. Je ne confonds pas non plus nationalisme et patriotisme. Les Français ont besoin de retrouver cette fierté française qui est le meilleur antidote contre la peur du monde. Mais j’estime aussi qu’il faut redonner plus de liberté aux citoyens, aux salariés, aux entrepreneurs, là où un excès de bureaucratie et d’administration paralyse les initiatives. Il est frappant de constater les convergences des propositions économiques entre extrême droite et extrême gauche. Ces deux tendances idéologiques ont pour point commun de se méfier profondément de la liberté individuelle.

Pour contrer les extrêmes, il faut un socle idéologique. La droite républicaine est dans son rôle lorsqu’elle défend l’histoire et les valeurs du drapeau tricolore qui appartient à tous ceux qui l’aiment. Elle est dans son rôle lorsqu’elle porte la première valeur de notre devise, la Liberté. J’assume ce socle. Et je pense que c’est le meilleur moyen de rassembler nos compatriotes qui cherchent des repères et une espérance.

 

Marine Le Pen a fait savoir que Macron était son concurrent préféré pour un second tour. Et vous, entre Emmanuel Macron et la Présidente du Front National, lequel est votre concurrent privilégié ?

C’est tout à fait hors de mes préoccupations. Mon seul objectif est de démontrer que mon projet de redressement national est le seul qui soit adapté à la situation difficile de la France. Mon diagnostic est clair : nous allons décliner si nous ne mettons pas en œuvre des réformes ambitieuses. Je veux redonner l’espoir aux Français. Je compte les libérer des normes et pesanteurs bureaucratiques qui les empêchent d’agir. J’entends réhabiliter des valeurs qui ont été négligées ces dernières années : l’école, la famille, l’ordre, le respect, l’amour du pays. Je veux combattre tous les maux qui rongent notre société : l’antisémitisme, la déresponsabilisation, le laxisme. Je propose que la France reprenne l’initiative, avec l’Allemagne, pour relancer le projet européen sur de nouvelles bases. Et je souhaite que la France redevienne une nation influente et écoutée sur la scène mondiale. Aucun de mes concurrents ne propose un programme aussi complet et déterminé. Il faudra beaucoup d’énergie et une bonne dose d’expérience pour le mettre en œuvre : je les ai.