Comme chaque année, le dîner du CRIF a été l’occasion de rassembler autour des responsables de la communauté juive de France la classe politique au grand complet, au premier rang de laquelle le Président de la République et son gouvernement, et de rappeler les risques que représente l’antisémitisme pour la démocratie.
Triste hasard du calendrier, le dîner du CRIF 2013 clôturait une semaine de commémorations en mémoire des victimes de Mohamed Merah à Toulouse et à Montauban. Dans son discours, le président du CRIF a ainsi souligné que « comme le nazisme, l’idéologie de Mohamed Merah déshumanise ses adversaires. Cette idéologie, c’est l’islamisme radical. Toutefois, pas question de confondre islam et islamisme radical » et Richard Prasquier de poursuivre : « Le crime, ce n’est pas quand on attaque l’islam, le judaïsme, le christianisme ou l’athéisme. C’est quand on attaque les musulmans parce qu’ils sont musulmans, appelons-le musulmanophobie, les juifs parce qu’ils sont juifs, c’est l’antisémitisme, les chrétiens parce qu’ils sont chrétiens et les athées parce qu’ils sont athées. » S’appuyant sur les chiffres des actes antisémites commis en 2012 et publiés par le Service de Protection de la Communauté Juive, 614 actes dont 96 avec violences contre des individus, R. Prasquier a évoqué « le sionisme, ce mot qu’on cherche à diaboliser » et a condamné les appels au boycott d’Israël.
« Cette paix, a-t-il poursuivit, doit s’inscrire sur le papier mais avant tout dans le cœur des hommes. […] L’heure n’est pas à l’angélisme : le conflit israélo-palestinien est situé dans une région où les démocrates à l’origine des révolutions arabes ont cédé la place aux islamistes ; Israël y cimente les divergences et canalise les ressentiments », et de conclure, « Je veux parler de ce sentiment pénible d’être continuellement interpellés sur notre soutien à Israël. Cette interpellation, je l’appelle israélophobie. L’israélophobie est devenue une passion collective. Elle donne aux Juifs le sentiment d’être suspects quand ils défendent Israël. Elle est au centre de notre malaise ».
Suivant le protocole, le chef de l’Etat a ensuite pris la parole devant le millier d’invités présents au pavillon d’Ermenonville. François Hollande a fustigé à son tour l’antisémitisme qui « n’est pas seulement la haine des Juifs mais aussi la détestation de la France » a-t-il dit. « Comment admettre qu’au début du XXIe siècle la police soit conduite à protéger des écoles, comment supporter l’idée que des enfants puissent redouter de se rendre à l’école et des parents de les y envoyer », s’est interrogé le Président avant de trancher : « la République sera en paix avec elle-même lorsque cette peur-là aura définitivement disparu ».
Pour se faire, F. Hollande a expliqué que la lutte contre l’antisémitisme passait par l’éducation et l’enseignement de la Shoah qui « doit pouvoir être enseignée partout, dans tous les collèges et les lycées de France, dans nos villages, dans nos cités, dans nos banlieues », « ce n’est pas un enseignement à option » a-t-il insisté. Evoquant la multiplication des « tweets antisémites », le chef de l’Etat a dit qu’il « ne peut y avoir d’impunité pour les auteurs racistes et antisémites […]. Ils doivent savoir qu’ils seront poursuivis et condamnés pour leurs agissements ».
Le chef de l’Etat a par ailleurs rappelé sa détermination à lutter contre le terrorisme et l’engagement de la France, en ce moment même, au Mali afin d’éradiquer ce mal profond qui menace directement toutes les démocraties. Il s’est également fait l’avocat de l’enseignement de la « morale laïque » voulu par le ministre de l’Education Vincent Peillon, expliquant qu’il ne s’agit « pas de faire la morale » mais rappeler « les principes de la République : la laïcité, les repères, les disciplines et les règles».