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Israël

Nouvelle étape dans l’affaire Al-Doura

13 ans après les faits, le gouvernement israélien publie un rapport défendant une version totalement opposée à celle de France 2, à l’origine de la polémique.

30 septembre 2000. Le correspondant permanent de France 2 en Israël, Charles Enderlin, signe un reportage dans le journal de 20h dans lequel un jeune Palestinien de 12 ans, Mohammad al-Doura, et son père Jamal sont pris sous les tirs croisés de l’armée israélienne et de combattants palestiniens. D’après le commentaire du journaliste, c’est une balle israélienne qui tuera quelques instants plus tard le garçon dans les bras de son père. Ces images, largement exploitées par les chaînes de télévision arabes, feront le tour du monde, alimenteront la seconde Intifada de 2000 à 2005, serviront de « fond » à l’exécution de Daniel Pearl en 2002 et seront même l’une des motivations de Mohamed Merah en 2012, le tueur de Toulouse et de Montauban souhaitant « venger les enfants palestiniens ». Est-ce cette dernière histoire tragique qui a enfin poussé le gouvernement israélien à publier sa version des faits ?

Quoi qu’il en soit, le rapport de Yossi Kuperwasser, directeur général du ministère israélien des Relations internationales, est sans appel : le reportage de France 2 est un montage grossier montrant des évènements qui n’ont pas eu lieu. Selon le rapport d’une trentaine de pages, « Les accusations et affirmations centrales du reportage de France 2 sont infondées dans le matériau que la chaîne avait en sa possession au moment du reportage », et de préciser, « contrairement à l’affirmation du reportage selon lequel l’enfant a été tué, le visionnage des images non montées montre que dans les scènes finales, qui n’ont pas été diffusées, on voit l’enfant vivant ». Ainsi, selon les autorités israéliennes, il n’y a pas de « preuve que Jamal ou l’enfant aient été blessés de la manière présentée par le reportage. Au contraire, il y a de nombreuses indications selon lesquelles aucun des deux n’a été touché ». Pour étayer cette thèse, le rapport explique que l’examen balistique des impacts de balles à proximité du père et de son fils « montre qu’il est extrêmement douteux que les balles puissent avoir été tirées depuis la position israélienne comme l’implique le reportage de France 2 ».

Si cette version des faits était attendue, elle ne peut strictement mettre un terme à la polémique, le journaliste campant toujours sur sa position initiale et la chaîne publique n’ayant pas participé à cette commission d’enquête. Elle aurait même refusé de transmettre les fameux rushs que les Israéliens ont néanmoins pu se procurer pour fonder les conclusions de ce rapport. Aussi, il n’est pas surprenant que les réactions à cette publication soient contradictoires. Si Benjamin Netanyahou a salué ce travail en soulignant qu’ « il n’y a qu’une seule façon de contrer les mensonges, c’est par la vérité », Jamal al-Doura déclare lui que ce rapport est « fabriqué de toute pièce ».

Reste encore un autre volet, judiciaire celui-ci, puisque Charles Enderlin avait porté plainte pour diffamation contre Philippe Karsenty, le dirigeant du site Media-Ratings, à l’origine de l’affaire. Le verdict de la cour d’appel de Paris sera prononcé le 22 mai.