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Religion

Qiryath Herzl

Depuis les temps les plus reculés, même avant sa conquête par David, et jusqu’à 1860, Jérusalem était parfaitement définie de façon géographique. Ce fut ce que nous nommons aujourd’hui le Mont du Temple, le Ophel et la cité de David au centre ; le quartier chrétien de la vieille ville, le quartier arménien et le Mont  Sion (faussement nommé) à l’ouest et une partie du Mont des Oliviers, surtout là où se trouve Getsemani et le lieu où on procédait au rite de la vache rousse, à l’est. Depuis ce temps, elle n’a pas changé tout en devenant biblique, historique et une ville sainte, d’abord pour les Juifs, ensuite pour les Chrétiens et les Musulmans. Tout ce qui se dit d’elle à travers les siècles et l’importance qu’on y attache encore aujourd’hui ne se dit que de cette espace.

A partir de 1860, il va se passer à Jérusalem ce qu’il allait se passer plus tard avec Jaffa. Des Juifs commencent à construire, à l’ouest de la ville, de nouveaux quartiers. Ce sera Michkenoth Chaananim, Yemin Moche, Na’halath Chiv’ah et d’autres. La naissance du sionisme en 1897 va donner un formidable élan à cette construction jusqu’à faire de cet ensemble une grande ville juive, moderne et sioniste. Pour Jaffa, les choses se clarifient par la séparation de l’ensemble juif de la ville mère en devenant Tel-Aviv, la première ville juive des temps modernes. Ce n’est pas le cas à Jérusalem. On continue à appeler cette nouvelle entité Jérusalem.

Le partage prévu par le vote des Nations Unies en 1947 et qui crée un corpus separatum englobant  tout ce qu’on nomme (faussement) Jérusalem est la première erreur dans la voie de la paix. La deuxième erreur va être commise par Ben Gourion qui, après la guerre d’indépendance et la signature de l’armistice avec la Jordanie qui laisse toute la ville sainte aux mains des Jordaniens, fait de cette partie moderne la capitale d’Israël sous le nom de Jérusalem, bien que rien de ce qui s’y trouve ne réponde à la définition de Jérusalem. Rien n’y est biblique, ni historique, ni saint.

C’était le moment où il fallait proclamer la ville nouvelle capitale de l’Israël moderne, juif et sioniste et lui donner un nom en conséquence. Vu la nomination du Mont Herzl avec sa Tombe comme un centre de la vie israélienne, il me semble que le meilleur choix aurait été Qiryath Herzl, en hommage au rôle qu’il a joué dans la création de l’Etat juif. D’ailleurs, Tel-Aviv se nomme aussi par rapport à lui. C’est la traduction hébraïque proposée par Sokolow du titre de son livre Altneuland.

Jérusalem, telle que nous l’avons définie, n’appartient à personne, ni à l’Israël moderne, ni à un éventuel état arabe, qu’il s’appelle Palestine ou autrement ; ou, plutôt, elle appartient à tous les Juifs, tous les Chrétiens et tous les Musulmans comme leur centre spirituel où Abraham a ligoté Isaac, David a établi sa capitale, Salomon a construit le premier Temple ; où Jésus a prêché et où il est mort et fut enterré (et, selon les Chrétiens, a ressuscité) ; où Mu’hammad, pendant son voyage nocturne sur sa jument El-Bouraq, a rencontré le ciel. Jérusalem ne peut qu’être hors du champ politique, former un ensemble appelé à être le centre mondial du monothéisme. Aucune exclusivité, ni juive ni chrétienne ni musulmane. Ceci implique évidemment qu’aucune exclusivité ne puisse s’exercer sur le Mont du Temple et que des Juifs et des Chrétiens, pour qui c’est un lieu saint, pourront y prier. Et pourquoi ne pas garder la Mosquée El Aqça comme lieu de prières pour les Musulmans, une église chrétienne (sans images) au nord près de la Via Dolorosa et du Saint Sépulcre et une synagogue à l’est, là où ne pouvait pas être le Saint des Saints, et faire du Dôme du Rocher, construit sur Even haChtiyah (La Pierre de Fondation), le lieu de prière commune pour tous les monothéistes et pour tous ceux qui voudraient se joindre à eux.

Tout devient simple. La capitale d’Israël, qui jouxte Jérusalem, Qiryath Herzl, reconnue comme faisant partie d’Israël par tout le monde. Les ambassadeurs de tous les pays qui entretiennent des relations diplomatiques avec Israël pourront s’y installer. Les Palestiniens pourront faire de même, choisir une capitale qui ne sera pas Jérusalem. On retire aux négociations de paix entre israéliens et Palestiniens une pierre d’achoppement considérable. Le refus général du monde pour le choix des israéliens peut se changer en acceptation et en finir avec l’isolement d’Israël.

Benjamin Duvshani est né en 1930 à Qiryath Herzl, sa grand’mère à Jérusalem en 1850 où a déjà vécu son arrière-arrière grand’mère, arrivée en 1826. Il a participé à la guerre d’Indépendance dans la défense de Gouch ‘Etsion, fut blessé et était prisonnier de guerre en Jordanie.