Les auditeurs de RCJ connaissent sa voix mais peut-être pas encore sa plume. Cor-respondante pour la fréquence juive (94.8fm) à Jérusalem et journaliste pour différents médias israéliens, Katy Bisraor Ayache offre avec son livre En direct d’Israël, Chroniques intimes d’un pays, aux éditions IN PRESS, un regard tendre mais objectif sur un pays « confetti [qui] suscite l’espoir du peuple juif ». Un livre-témoignage, comme une radiographie pour mieux comprendre une réalité qui semble parfois dépasser l’entendement.
Compilation de rencontres, de situations du quotidien et de portraits d’hommes et de femmes qui constituent la mosaïque étonnante qu’est la société israélienne, cet ouvrage rend compte du melting-pot qui la compose. Sous un même drapeau vivent ainsi Juifs, Arabes, Russes, Ethiopiens, israéliens ou étrangers venus du monde entier et de toutes les religions. Bien loin du conflit israélo-palestinien, Katy Bisraor démontre avec finesse la subtilité mais aussi la fragilité d’un pays plongé depuis sa création au cœur des tourmentes et qui, malgré tout, incarne aussi aux yeux du monde un fol élan d’énergies, qu’elles soient économiques, artistiques ou technologiques.
« Israël génère les contraires. Le désert et la mer, la sainteté et le prosaïque, le raisonnable et l’irrationnel, l’exigence et l’insouciance, le sublime et le vulgaire, l’existentiel et le superflu », écrit-elle en préambule avant de nous faire rencontrer Yared, réfugié africain venu chercher fortune et liberté religieuse, Rachel, convertie au judaïsme alors qu’elle se croyait déjà juive, Ofra Strauss, héritière de l’empire agroalimentaire Strauss-Elite qui génère un chiffre d’affaires de deux milliards de dollars, ou encore la poétesse Vaan Nguyen Thi Hong, sauvée d’un boat people vietnamien en 1977 et devenue depuis l’une des plus grandes plumes de langue hébraïque. « Tenter de mettre la guerre en filigrane », c’est aussi ce qui semble rassembler chacun des israéliens. Que leurs histoires soient communes ou différentes, que leurs traditions soient partagées ou non, Katy Bisraor Ayache pose son regard attentif sur les étales de marchés aux saveurs épicées, entre dans des foyers marqués par la Shoah ou par la conquête de ce territoire en 1948, et livre à la fin une synthèse toute journalistique, « tout en chiffres », des nombreuses communautés qui cohabitent ensemble. Pour toutes ces raisons, et peut-être plus qu’ailleurs, chaque destin individuel semble prendre ici une dimension quasi universelle.
L’expression « entre tradition et modernité », sauvent galvaudée, prend dans ce pays tout son sens tant son l’histoire, qui se compte en millénaires, paraît sans cesse n’aller que de l’avant grâce au dynamisme d’une société en perpétuelle mutation.