Jeudi soir, peu après 22h30, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou et son ministre de la Défense, Moshe Ya’alon, ont officiellement donné l’ordre à l’Armée de lancer une opération terrestre dans la Bande de Gaza.
Cela faisait pourtant déjà plus de trois heures que les soldats se préparaient à entrer en territoire ennemi. Ronen a reçu un appel de son petit frère, soldat de Tsahal, vers les coups de 19h00. « Je serai injoignable sur mon portable les prochains jours », lui a lancé le soldat, suivi de « déduis-en ce que tu veux ».
Discrétion oblige, mais pas besoin de davantage d’explications, Ronen comprend la signification exacte de ces paroles. Cela fait nombre de jours que son frère se tient posté sur la frontière Sud ; comme des milliers d’autres recrues, il attendait les ordres en observant les tensions s’amplifier, se demandant s’il allait entrer ou non dans Gaza.
Ronen est inquiet pour son frère, d’autant plus que ce dernier appartient à une unité spéciale ; il est l’un de ceux qui avancent en premier sur le terrain, précédant les troupes et les chars.
Lors de l’opération Colonne de Fumée, en novembre 2012, les milliers de soldats postés le long de la frontière – soldats en cours de service ou réservistes – étaient rentrés chez eux sans qu’aucune troupe ne pénètrent dans Gaza. Cette fois-ci, les tirs du Hamas sur les villes israéliennes ne cessant pas, en dépit des bombardements de la Hel’avir (l’armée de l’air), le cabinet israélien a ordonné la multiplication des forces sur le terrain. La décision d’une incursion terrestre aurait été prise depuis déjà mercredi, après le refus du Hamas de la proposition égyptienne de cessez-le-feu. L’objectif de l’incursion terrestre consiste à détruire l’arsenal de tunnels souterrains menant de Gaza jusque sous le territoire israélien.
Le long de la frontière de Gaza, jusqu’au dernier moment, les milliers de soldats rassemblés ignoraient encore le déroulement des opérations. Ces derniers jours, des volontaires de part et d’autre du pays sont venus montrer leur soutien en leur apportant à manger. Udi est un ancien commandant de Tsahal, il était tankiste à Gaza, il y a une décennie, avant le désengagement de 2005. Avec ses collègues de travail, il s’est rendu jeudi après-midi parmi les jeunes conscrits. « Il y a énormément de monde », témoigne-t-il, « des soldats, des chars de tous les côtés ». Il décrit l’atmosphère : « Certains soldats sont tendus ; d’autres espèrent que l’incursion aura lieu, afin de mettre un terme aux tirs du Hamas une bonne fois pour toutes. »
« J’espère qu’ils ne vont pas m’appeler ! » poursuit Udi. Dans la nuit, le cabinet israélien a en effet approuvé le recrutement de 18,000 soldats de réserve additionnels. 1,500 ont déjà été appelés la semaine dernière. La plupart d’entre eux appartiennent à des unités du Front Intérieur ou aux équipes de Défense aérienne du Dôme de fer. Parmi les réservistes convoqués en renfort, certains seront directement impliqués dans l’opération Bordure Protectrice ; d’autres remplaceront les soldats en service postés habituellement à la frontière Nord, et appelés en ce moment à Gaza.