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Chronique des questions, par Salomon Malka

Pourquoi l’inculture est-elle devenue la norme ? Pourquoi nos modernes théoriciens ont-ils relooké Marx en animateur socioculturel pour « caillera » ? Pourquoi l’idéologie de l’excuse, l’explication par le tout-social, le « sociologisme » (Vous êtes des abrutis, mais on va raconter au monde pourquoi vous avez de bonnes raisons de l’être) tiennent-ils le haut du pavé ? Pourquoi l’anticolonialisme n’a-t-il gardé de ses péchés de jeunesse que la haine de la démocratie ? Pourquoi n’y a-t-il toujours pas d’instance de régulation digne de ce nom pour faire pièce aux dérives d’internet ? Pourquoi faudra-t-il attendre les historiens du futur pour comprendre comment certains intellectuels de gauche, attachés à la liberté et à l’état de droit, en sont venus à défendre un « obscurantisme barbare » ? Pourquoi a-t-on tant tardé à pointer les maux auxquels il est urgent de répondre quand on les connaît parfaitement : l’islamisation des prisons, l’effritement du principe de laïcité à l’école, la radicalisation des jeunes de banlieue ? Pourquoi ne trouve-t-on personne pour manifester pour les chrétiens d’Orient alors que les manifestations pro-palestiniennes font toujours autant recette ? Pourquoi le Mrap, né au lendemain de la guerre, issu du PC, d’anciens résistants et déportés, et qui était à l’origine un mouvement contre l’antisémitisme, contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples, a-t-il fait disparaître le mot antisémitisme un beau matin ? Pourquoi, au lendemain d’attaques contre des lieux juifs en France, a-t-on décidé, pour faire bonne mesure et ne pas « stigmatiser », de dissoudre une « Ligue de défense juive » qui comptait une trentaine de membres en tout et pour tout ? Pourquoi tous ces articles de journaux sur le conflit israélo-arabe, s’appuient-ils le plus souvent sur « une connaissance historique qui date à peine du dernier tir de roquette » ? Pourquoi un reportage sur l’assassinat de quatre personnes au musée juif de Bruxelles doit-il être obligatoirement ponctué, sur le fil-info de la chaîne, par les résultats de tennis de Roland Garros (l’info, c’est sacré, mais c’est moins sacré que les pages de publicité qui, elles, font s’interrompre sur le champ la même bande passante) ? Pourquoi Boualam Sansal, lauréat en 2014 du prix France-Inter qui devait lui être remis à l’Institut du Monde arabe, a-t-il vu la réception annulée parce qu’il avait fait un voyage en Israël pour y rencontrer des intellectuels israéliens et palestiniens ? Pourquoi Plantu, qui en fait des tonnes dans la « bien-pensance pro-palestinienne », veut-il à tout prix faire passer le dessin d’une colombe pour un acte de courage caractérisé ? Pourquoi personne ne rappelle à Noam Chomsky qu’il eut naguère, pour parler de la tragédie cambodgienne une expression – « un génocide éclairé » – qui méritait de passer à la postérité ? Pourquoi Edwy Plenel n’a-t-il jamais reconnu, lui le chevalier blanc du journalisme d’investigation, s’être trompé quand lors d’une conférence en Jordanie, il s’est basé sur une fausse lettre pour déclarer que Mandela avait condamné une politique d’« apartheid » de l’État d’Israël ? Pourquoi les chanteurs de Rap prennent-ils une grosse voix pour menacer de tout faire péter, et une petite voix pour réclamer qu’on ne touche pas à leurs mamans ? Pourquoi, en ces temps de ricanements, personne ne rappelle ce mot de Wolinski : « Le rire est le plus court chemin d’un homme à un autre » ?

Toutes ces questions, et d’autres sont empruntées au livre de Philippe Val, « Malaise dans l’inculture », qui vient de paraître. Elles nous éloignent, mais pas tant que cela, du thème de notre « Hors-série » (il s’en prend à Rousseau, dont viendrait tout le mal, qui serait l’ancêtre de Robespierre… On n’est pas obligés de le suivre sur ce terrain, mais son livre est mordant, incisif et mérite en tout cas d’être débattu).

À ces questions, il faudrait en rajouter une dernière : Pourquoi personne ne parle du livre de Philippe Val ?

Notre ami Armand Abécassis publie un essai consacré aux « Derniers jours de Moïse », sur lequel nous reviendrons, et d’où nous extrayons ces lignes : « C’est en retrouvant la double mémoire de ce qu’il reçut d’Athènes et de Jérusalem, que l’Occident saura affronter les forces de dissolution qui le minent dans le vivre-ensemble, à l’école et dans la famille ».