Actrice, elle excelle aussi bien dans le drame que la comédie. Mais ce n’est pas tout, elle écrit, compose et chante. Débordante d’invention, elle semble s’être construite avec son mari l’artiste Itamar Shimsony. Rencontre avec l’Arche à l’occasion de la sortie de son album ID.
Dana, que fais–tu en ce moment ?
En ce moment, je suis ici, avec toi. Sinon, je reviens d’une tournée théâtrale d’un mois et demi, aux Etats-Unis. J’y étais également en début d’année, pour le même spectacle, Odd Birdz *, avec Tziporella *, la compagnie de théâtre dont je fais partie. A ce moment-là, j’y étais restée trois mois et demi, et j’en ai profité pour faire mon clip (On the Bus *, réalisé par Vania Heymann).
Mon mari, Itamar Shimshony *, quant à lui, présentait son exposition. Il est artiste, peintre et vidéaste. Il a fait une installation/performance, qui s’appelle Toys R Art *. Il prend quantité de jouets, les défait, puis les reconstruit sous des formes originales, créant une sculpture.
Parle-moi de ta troupe.
Tziporella est le nom de la compagnie, qui vient de Tzipora, qui veut dire ‘oiseau’, en hébreu. Nous jouons au théâtre Tzavta, toute l’année, à Tel-Aviv. On y donne trois spectacles différents. Le nom d’un des spectacles est Odd Birdz, en anglais cela signifie ‘Drôles d’Oiseaux’. Celui-là a été créé exclusivement pour la tournée. C’est un mélange de tous nos spectacles. On y a pris les sketches les plus universels, auxquels on a ajouté certains nouveaux. On l’a joué en Italie, à New York, même en Australie !
Comment est née cette compagnie ?
Nous l’avons crée avec neuf amis. On étudiait ensemble à l’école de jeu, puis nous avons décidé de garder ce lien. Cela fait maintenant dix ans.
Quel genre de spectacles y sont produits ?
Des choses qui nous intéressent, que l’on trouve drôles, ou parfois stupides. C’est très éclectique et le genre peut s’apparenter au ‘slapstick’, du burlesque, avec de l’acrobatie, de la danse, de la satire. Un vrai mélange.
As-tu un personnage préféré ?
Oh… Il y a tellement de choses marrantes. Je suis incapable de te dire lequel je préfère. Je t’enverrai des extraits sur youtube…
Je préfère te voir en live ! Niveau musique, sur quoi travailles-tu ces jours-ci ?
Mon activité principale actuellement est la sortie de mon album ID *(disponible sur Bandcamp) et la présentation de mes chansons au public pour la première fois. C’est très bizarre pour moi, parce que je suis actrice depuis l’âge de huit ans. J’ai donc beaucoup d’expérience dans ce domaine. Mais là, avec la musique…
J’avais pas mal d’expérience avec le piano et le fait d’écrire des chansons, mais je n’ai jamais laissé quiconque les entendre. Je n’ai jamais été sur scène avec et je ne sais pas ce que l’on peut ressentir. C’est curieux pour moi de dire que, oui, j’ai un concert, et tout le monde peut acheter des billets. Je ne sais même pas quel sera mon ressenti. C’est pour ça que j’ai fait les deux petits pré-shows.
Comment ça s’est passé ?
A vrai dire, le premier, je n’ai pas vraiment pu l’apprécier.
Tu étais nerveuse ?
Non, ce n’est pas vraiment ça, c’était un concert réussi. Les gens ont aimé, les musiciens ont aimé, mais tous mes sens scannaient la situation, du genre : Que se passe-t-il ?! Le second concert, en revanche, j’ai vraiment pu l’apprécier. J’espère que ce sera de plus en plus sympa, ça s’améliore à chaque fois. Je fais de la vidéo, en même temps, sur scène. Tu sais, j’ai un clip sur youtube, celui de Friday * …
J’ai tout fait moi-même, filmé, monté… C’est devenu très facile, comme ça, avec cette idée. La musique n’est pas ma seule activité, mais j’ai libéré mon emploi du temps pour pouvoir m’y consacrer pleinement, avec toute mon énergie. Je voulais participer au terrain de jeu, ne pas seulement rester sur le bas-côté, pour regarder à quoi jouaient les autres enfants.
Quand t’es tu dis : ‘Je vais vraiment tenter la chanson’ ?
Beaucoup de choses y ont contribué. Je crois que cela a débuté lorsque Michael Jackson est mort (rires) car, de tout temps, il fut mon idole. Depuis toute petite, je me disais : ‘Je vais probablement le rencontrer un jour, je le verrai quand l’occasion se présentera… et puis il est mort. C’est alors que j’ai compris que les choses ne duraient pas éternellement. Si l’on veut vraiment faire quelque chose, il faut le faire, car le temps passe. Même Michael Jackson n’est pas éternel. Cela m’a fait un choc car, pour moi, il allait toujours être présent. Puis, soudainement, il s’est éteint. J’écris des chansons depuis mon plus jeune âge, avant même de me mettre au piano, à mes douze ans. J’écrivais avant de jouer la comédie. C’était un besoin primal car, après tout, la musique fut ma première activité artistique. Par timidité, ou parce que je me suis dit que ce n’était pas assez bien, je l’ai mis de côté. Je me suis dit, c’est stupide, tu n’en fera jamais rien. J’ai donc abandonné en pensant que ça ne servait à rien de se torturer. Pourtant, à chaque fois que j’écrivais une chanson, j’espérais pouvoir la partager. Mais je me suis dit, oublie ça, laisse tomber. Puis, un jour, j’ai vu une vidéo de Pharrell sur youtube. Ça s’appelle ‘Pharrell at work’ et c’est lui, dans un studio, en train de créer un morceau. Des gens rentrent et sortent, mais cela ne semble pas le perturber.
Y’a t-il une fille à ses côtés ?
Oui.
Quelle était la chanson ?
Je ne crois même pas qu’elle soit sortie…
Midnight… quelque chose ?
Oui, oui ! (Elle se met à chanter). Cette vidéo m’a, tout bonnement, secouée. Pharrell, c’est le patron, mais, en fait, il crée sa chanson comme un enfant. Il ne sait même pas exactement ce qu’il dit, ou ce qui va suivre. Je me suis dit, mais c’est comme ça que je fais, moi, que j’écris, et pourtant j’en ai honte. C’est devenu clair qu’il n’y avait pas de quoi avoir honte a être comme un enfant, en fait, il faut en être fier. C’est la bonne voie. Regarde Pharrell, me disais-je, rien n’arrête sa créativité. Peu importe si la fille est au téléphone, ou si quelqu’un rentre dans la pièce, il est dans sa bulle. Il prend ça comme un jeu et s’amuse. J’ai bien appris ma leçon. ‘Oui, c’est ça ! Arrête de prendre ça tant au sérieux. Et si ça ne plait pas, blabla… Et alors ?!!’ Je dois faire ce que j’ai à faire ou je ne pourrai me regarder dans la glace. Je dois jouer, je dois faire de la musique…
Quoi d’autre ?
Écrire, réaliser, un jour ou l’autre. Je me suis donné jusqu’à quarante-cinq ans pour réaliser mon premier film. C’est ma date butoir et j’espère y arriver.
De la peinture ? Du dessin ?
Oui, j’en fais, mais je ne ressens pas le besoin de le partager. Je le fais pour m’amuser. Quand je suis tombée enceinte, je me voyais écrire à nouveau. De mémoire, j’ai toujours fait, au moins, deux ou trois choses, en même temps. Après ça, j’aurai un enfant, cela me semblait plus compliqué. C’était un sentiment de ‘maintenant ou jamais’. J’ai donc lancé mon appel au financement sur internet (Headstart) lorsque j’étais enceinte. Quant à l’album, il fut entièrement enregistré à mon huitième mois de grossesse. Oui, c’était un coup sur le buzzer, à la dernière minute… Je compte faire mon prochain album en moins de temps ! (Rires).
Pour ton album, comment s’est composé ton entourage ?
En fait, malgré mon manque d’expérience, j’ai eu beaucoup de chance. D’abord, j’ai rencontré mon producteur, qui m’a beaucoup motivé. Il a dit, allez, on va enregistrer dans ta cave ! J’ai répondu, oui, super ! Comme il fallait faire confiance, j’ai été guidée. Des gens formidables m’ont rejoint, sans trop de préparation. Mes amis musiciens m’ont donné des conseils… C’est incroyable à quel point je n’y connaissais rien, avant de me lancer dans cette aventure.
Tu es arrivée avec des structures de chansons très élaborées ou simplement des idées de mélodies ?
Une chanson comme Friday était quasiment aboutie. J’avais déjà posé le piano et les voix. J’écris les parties comme des voix, ce qui constitue une bonne partie de la structure finale. Par exemple, j’entendais pas mal de trompettes, dans ma tête, pour cet album. Je les ai chantées pour m’en souvenir. Je savais qu’il me fallait de la trompette et un très bon batteur.
Dois-je attendre le live ou me conseilles-tu d’écouter l’album en premier lieu ?
Tu devrais écouter l’album, car certaines des chansons sont différentes dans le live. Certaines sont identiques, et d’autres non. L’expérience d’un album, dans ses écouteurs, reste ce qu’il y a de mieux. Pouvoir l’écouter en conduisant, dans le train, le bus, ou simplement en se baladant dans la rue…
