Né à Nice, il est un sportif de fabrication locale qui est devenu un champion international. Plusieurs fois champion de France, d’Europe et du monde en karaté, il a servi d’entraineur de l’équipe nationale, de celle des Etats-Unis et de Grèce. Après 2 ans passés au « Château de la Star Academy » en qualité de coach pour les candidats, il revient à Nice pour se consacrer au sport dans sa ville. Désormais, il opère dans le coaching et le consulting de grandes entreprises nationales et internationales et conduit une charge de mission pour la Ville de Nice, organisant des événements sportifs sur le mode « Développement/Santé ».
L’Arche : Vous êtes né à Nice. Au moment de l’attentat commis par Mohamed Lahouaiej Bouhlel, vous étiez à la veille d’un événement sportif à Auron, une station de ski du département des Alpes-Maritimes ?
Christophe Pinna : A l’image d’une orientation sportive que je développe avec la Ville de Nice sur le thème du « Sport, Santé et Dépassement de soi », j’étais invité à parrainer un rendez vous convivial et familial. Comme tout le monde, j’ai appris la tragédie et, à l’image de tous, j’ai aussitôt pris le maximum de nouvelles auprès des miens et de tous ceux auxquels j’ai pensé. J’éprouvais alors une profonde tristesse pour les victimes et ma ville. Bien sûr, la course d’Auron ou « Mountain Trail Côte d’Azur » a été annulée. Alors, plutôt que de rester dans la sidération, des amis et moi-même avons préféré maintenir la course – sans la compétition et autres formes de récompenses – et couru avec un brassard noir.
L’Arche : Certains disent que nous sommes en guerre. Qu’en pensez vous ?
Christophe Pinna : Cela c’est du langage de politiques, mais on a dépassé le seul stade militaire et l’idée de guerre menée à l’extérieur de nos frontières. J’en viens même à douter que nos élus aient bien compris le concept de « guerre asymétrique » où on ne joue pas avec les mêmes règles. Il semblerait que nos responsables n’aient pas les bons outils en main. C’est aussi chez nous que nous devons nous battre. Mais « nous battre » contre l’intolérance et la barbarie. Nous devons ramener nos valeurs au centre du débat citoyen et ne pas laisser les seules décisions aux mains des politiques. Car l’incurie de nos responsables de tous bords ne semblent pas empêcher la division. Ces terroristes me font penser à des moustiques dans un magasin de porcelaine comme dans les oreilles d’un éléphant. La disproportion des forces semble évidente et pourtant on sait qui est susceptible d’user l’autre. Avec des moyens limités, ces barbares compensent avec une vraie détermination mortifère. Ils sont nos voisins, héritiers de la génération du « vivre ensemble ». Un échec.
L’Arche : Dans le sport ou vos activités extra sportives, vous côtoyez tout le monde, quelles que soient leurs origines, sexe ou clan politique. Croyez vous encore que nous puissions nous retrouver après un drame pareil ?
Christophe Pinna : Au plus loin que nous ramène l’histoire de Nice, la mixité des origines a fait de la population niçoise ce qu’elle est : un tissu multiculturel qui partage un amour commun et passionnel pour la Ville de Nice. Fiers de nos racines, nous ne sommes pas chauvins pour autant. La preuve : la contribution des Anglais à la promenade, les Etats-Unis au quai qui la prolonge, et j’en passe… Même quand je suis à l’étranger, je me sens comme un ambassadeur de ma ville. Et des sportifs niçois que je connais, nous partageons un même lien de fraternité niçois.
L’Arche : A votre avis, y aura t-il un « avant et un après » 14 juillet 2016 ?
Christophe Pinna : On va rebondir. Comme pour d’autres certainement, j’aurais du mal à enfiler mes chaussures pour courir sur ma promenade comme si rien ne s’était passé. Mais dans quelques temps, je reviendrai fouler le bitume du front de mer niçois. A 12 ans, j’étais sur la Promenade des anglais en compagnie de mon père et je m’étais promis de devenir champion du monde. Et une promesse est une promesse. D’ailleurs, je propose aux Niçois de penser à des moyens de se réapproprier notre ville et de ne pas permettre à ces barbares d’y laisser la moindre empreinte. Je ferai de même de mon côté et je fais la promesse de participer à toutes initiatives de reconquête des valeurs partagées par la plupart d’entre nous. Car nous sommes fiers d’une ville qui se décline en plusieurs langues « NIKAIA ou ville de la Victoire ; Nicaea fidelissima ou Nice la Très Fidèle ». A nous d’en faire la promotion.