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Sorties

Pour sortir de l’endoctrinement

La salle des feux de la rampe est remplie, l’hôtesse s’avance pour venir faire les recommandations d’usage. Elle ne vient pas demander d’éteindre les téléphones portables.

Après s’être excusée de devoir faire cette annonce, la jeune femme indique l’emplacement des issues de secours. Les spectateurs se regardent, sourires crispés aux lèvres. Avec une pièce qui s’appelle Djihad, l’entrée en matière pourrait être plus douce.

Pendant une heure trente les spectateurs sont plongés dans l’univers de trois jeunes hommes en route pour la Syrie. Ils partent « tuer des mécréants » et « aider leurs frères ». Le chemin, qui passera par la Turquie, est long et va s’avérer plus compliqué que prévu.

Une fois arrivés en Syrie par exemple, ils tombent sur Michel. Ce dernier vient de perdre sa femme dans un bombardement. Les trois djihadistes en herbe compatissent à sa peine et l’invitent à se joindre à eux en lui offrant de quoi manger. Bien sûr, à ce moment là ils ne connaissent pas le prénom de leur hôte. Lorsqu’ils l’apprennent et découvrent en même temps qu’il est chrétien, tout bascule. Il devient soudain l’ennemi à abattre. Pourtant, un événement tragique les fera douter de la haine qu’ils s’imposent à eux-mêmes et imposent aux autres.

La pièce à l’humour potache dévoile « une autocritique de la communauté dont je fais partie » explique Ismaël Saidi auteur, metteur en scène et comédien. Tout y passe, l’antisémitisme, l’endoctrinement, l’ignorance.

Qu’y a-t-il de pire que de tuer quelqu’un ou braquer une banque ? Manger du porc.

Ce qui frappe c’est la liberté de ton offerte à un grand public, sans démagogie, sans haine. On est loin de la politique. La société belge – qui ressemble à s’y méprendre à la société française, de ce point de vue au moins – n’échappe pas aux attaques. En rejetant ces concitoyens musulmans, les pousserait-elle au repli ? « J’achète hallal donc je suis », lancera un des protagonistes.

Le format choisi est celui d’une pièce facile d’accès pour se questionner. Les représentations sont d’ailleurs nombreuses dans les collèges et lycées, et il existe également un dossier pédagogique qui peut être utilisé comme support pour entamer la discussion avec les élèves. Un grand nombre de sujets y sont abordés comme la discrimination, le racisme, la liberté d’expression, les tensions identitaires.

La pièce Djihad est programmée jusqu’au 31 décembre au théâtre Les Feux de la rampe à Paris, en plus des représentations données dans les établissements scolaires.