En 1953, en même temps qu’elle donnait son feu vert à l’ouverture de Yad Vashem, la Knesset vota une loi pour honorer « les Justes », ces non-juifs, qui, pendant la Shoah avaient sauvé des juifs.
Mais les Israéliens avaient aussi décidé de faire l’impasse sur tous les juifs qui avaient porté secours à d’autres juifs durant cette période, et d’occulter le million et demi de juifs qui avaient combattu dans les armées régulières et les réseaux de résistance. Un comportement à rapprocher de l’accueil réservé aux rescapés de la Shoah.
Le Centre mondial du Bnai Brith et le Comité pour la reconnaissance de l’héroïsme des juifs ayant secouru d’autres juifs (JRJ), ont soumis à la Knesset un amendement qui permettrait d’étendre la portée de la loi sur les Justes aux juifs. Mais pour le moment rien n’a bougé.
Sans plus attendre, le Bnai Brith et le JRJ ont créé en 2011 la « citation du sauveteur juif », visant à récompenser ces anonymes, qui ont pris souvent les risques les plus insensés pour sauver les leurs. Depuis six ans, 162 personnes ont été honorées dans huit pays d’Europe.
Le 13 février, c’était au tour du Bnai Brith France d’honorer neuf « sauveteurs de juifs » au Mémorial de la Shoah.
Dans son intervention, Serge Dahan a salué « ces hommes et femmes courageux et engagés, héritiers du message de Jean Moulin dans Premier combat : « Je ne savais pas que c’était si simple de faire son devoir quand on est en danger ». Et le président du BBF d’ajouter : « Cette leçon transmise par ces sauveteurs juifs nous rappelle que devant l’extrémisme et la haine, il n’y a qu’une attitude à avoir : faire son devoir par le refus, l’intransigeance et la lutte ».
Ils ont été 9, les survivants ou leurs représentants à recevoir leur diplôme des mains de l’historienne Tsilla Hershco, spécialiste de la résistance juive en France et de Serge Dahan : Rachel Cheigam-Grunstein ; Joseph et Léon Goulachvili ; Théo Klein ; Liliane Lieber-Klein ; Fanny et Georges Loinger ; Marcel Mangel (le mime Marceau) et Nelly Willer.
Tous ces héros modestes, dont on ne connaît pas ou peu l’action, se sont engagés dès la fin de la guerre dans la reconstruction de la communauté juive de France décimée. Tout en essayant de continuer leur propre vie, ils ont pris tous des responsabilités avec compétence, conviction et générosité.
Présente dans l’auditorium de la rue Geoffroy-l’Asnier, Liliane Lieber-Klein a fait part de sa « grande joie de voir dans la salle plein d’enfants et de petits-enfants ». L’ancienne présidente de la Coopération féminine et des Enfants cachés a ajouté qu’elle gardait toujours des relations suivies avec les enfants qu’elle avait cachés. Son fils aîné et celui de Théo Klein, Jean-Michel Klein a révélé que ses parents avaient rarement parlé de leur action pendant la guerre, qu’il avait plutôt découvert par les récits des « enfants ».
Jean-Michel Klein a également lu un message de son père, qui n’a pas pu venir à cette cérémonie.
« Nous avions l’âge d’avoir 20 ans, l’âge ou tout est possible ». Toujours aussi malicieux à 96 ans l’ancien président du CRIF (fondé dans la clandestinité en 1943) et de l’Association des anciens de la Resistance juive !