Le député Likoud Yariv Levin a présenté la semaine dernière un projet de loi temporaire « à la demande du Premier ministre Benyamin Netanyahou, afin de donner à la police la capacité de restaurer la sécurité des citoyens ». Conséquence directe : moins de 10 jours après l’attaque terroriste de la synagogue de Har Nof, le ministre de l’Intérieur Gilad Erdan a révoqué le titre de résidence de Nadia Abu Jamal, l’épouse de l’un des terroristes qui a assassiné les cinq Israéliens.
Conformément à la loi sur le regroupement familial, Nadia Abu Jamal, palestinienne, a été autorisée à vivre en Israël parce que son mari avait le statut de résident permanent. « Chaque personne impliquée dans le terrorisme doit considérer les effets que cela pourrait avoir sur les membres de sa famille », a déclaré Erdan.
Le plan de Levin, publié par le quotidien israélien Yedioth Ahronoth, s’articule en huit points forts, dont la révocation automatique de la citoyenneté ou du statut de résident permanent de toute personne reconnue coupable de se livrer à des activités terroristes. Les corps des terroristes abattus au cours de leurs attaques seraient inhumés sans cérémonie et anonymement dans des lieux inconnus auxquels les familles n’auraient pas accès. En outre, les maisons des familles de terroristes seraient démolies dans les 24 heures suivant l’attentat. Les membres de la famille montrant un soutien public après l’acte de leur proche pourraient aussi perdre leur citoyenneté ou leur permis de résidence, et être expulsés vers Gaza. Les « lanceurs de pierres », les « incitateurs » à la haine ou les « agitateurs masqués » utilisant des bombes incendiaires lors de manifestations sont également visés par la proposition de loi, qui prévoit notamment leur arrestation et leur incarcération pendant toute la durée de la procédure judiciaire. Les suspects reconnus coupables perdraient leurs prestations de sécurité sociale de façon permanente ainsi que leur permis de conduite pendant 10 ans. Le projet de loi prévoit également une disposition permettant la fermeture des entreprises qui impriment des affiches de soutien au terrorisme. La proposition stipule enfin qu’une entreprise pourrait demander à la police de l’informer au cas où l’un de ses employés a déjà commis une infraction liée à la sécurité, et leur donnerait le droit de le licencier sans indemnités.
En définitive des mesures répressives qui relèvent plutôt du sens commun, en cas d’attentat contre des civils ou de soutien au terrorisme. D’autant que s’il est adopté par la Knesset, le projet agirait comme une solution provisoire dans les périodes de crises, prenant fin dès l’apaisement des tensions.
L’Association pour les Droits civils en Israël (ACRI) a bien sûr condamné le projet : « Les propositions absurdes soulevées par le député Levin comprennent des violations graves des droits de l’Homme et des actes de punition collective – qui n’ont aucun lien avec une guerre réelle contre le terrorisme », a avancé l’avocate de l’organisation. Par ailleurs, selon le conseiller municipal de Jérusalem Meir Margalit du parti Meretz, une telle mesure doit d’abord être approuvée par la Cour suprême. « Il s’agit seulement d’une idée, ce n’est pas une chose qu’ils peuvent faire facilement », a-t-il confié. « Ils doivent pour cela modifier la loi, et je ne pense pas que la Cour suprême accepterait une telle chose. C’est compliqué », a-t-il expliqué avant d’ajouter : « Je ne pense pas que nous devons punir les familles des terroristes, nous devons punir sévèrement les terroristes eux-mêmes. Il s’agit d’une forme de punition collective, et un pays démocratique ne devrait pas procéder de la sorte. »
Au-delà de la question de la conformité de ce projet avec les droits de l’Homme, se posent celles de son impact réel sur les terroristes et de son effet dissuasif quant au passage à l’acte. Si la clause permettant de licencier un salarié ayant commis une infraction liée à la sécurité pourrait avoir des répercussions économiques sur certains Arabes israéliens, beaucoup ne font pas le poids pour contrer la vague de terreur qui frappe Israël.
Nadia Abu Jamal a quant à elle déjà déclaré à la Channel 2 israélienne : « Comme si cela ne suffisait pas, mes enfants ont perdu leur père, ils vont également perdre la maison où ils vivent », provoquant la vive réaction du député Eli Ben-Dahan appartenant au parti HaBayit HaYehudi : « L’épouse du terroriste qui a assassiné cinq personnes innocentes et laissé 25 enfants sans père, pleure sur son sort et celui de ses enfants, je suis choqué, elle n’a aucune compassion pour les 25 enfants dont les pères ont été assassinés par son mari de sang-froid. »