Celle-ci se déroulera le jeudi 4 juin à 20h. A cette occasion, Jean-François Bensahel, président de l’Union Libérale Israélite de France, répond à nos questions.
L’Arche : Pourquoi avez-vous décidé d’organiser ce jeudi à Copernic une soirée-débat « En amitié et en soutien avec les Chrétiens d’Orient » ?
Jean-François Bensahel : Un génocide, celui des chrétiens d’orient, auquel il faut ajouter celui des yézidis, peuple kurdophone, de tradition religieuse iranienne et préislamique, mais aussi les massacres de chiites (c’est ainsi que la mosquée de Moussoul – ex Ninive – et qui abritait le mausolée du prophète Jonas, a été dynamitée) se déroule sous nos yeux au Levant, oui sous nos yeux, grâce aux réseaux sociaux. C’est sans doute la première fois que l’on peut y assister en direct. Le génocide des 250 000 assyro-chaldéens en 1915, des 1,5 millions d’arméniens la même année, des 6 millions de Juifs pendant la Deuxième Guerre mondiale, des 2 millions de cambodgiens dans les années 70, des 800 000 tutsis il y a 20 ans, n’étaient pas télévisés. L’homme de la rue pouvait continuer à déambuler les oreilles et les yeux mi clos, sans savoir vraiment, ce qui lui permettait de s’endormir chaque soir du sommeil du juste. Désormais, cette internationale de la haine, dont l’organe mondial de communication se nomme Internet, s’expose au grand jour. Il est désormais impossible de dire « on ne savait pas ». Car tous, nous savons. Nous n’avons plus d’excuse. Nous ne pouvons plus en avoir. Notamment nous, français et juifs, qui savons ce que c’est que l’extermination, nous devons être des acteurs engagés.
De plus alors qu’en France, on a crié en janvier 2014 « morts aux Juifs », et que le 9 janvier dernier, soit un an après, suite logique de cet appel à la destruction, on a de nouveau tué des Juifs, nous nous sentons doublement concernés, et nous sommes obligés de faire un parallèle entre ce qui arrive aux chrétiens d’Orient, là bas, et ce qui pourrait nous arriver ici. Pourrait car les pouvoirs publics ne le permettront pas. Mais c’est bien une même logique de la destruction et du meurtre qui est à l’œuvre.
Enfin, la modernité politique, les Lumières, dont les hommes libres sont les héritiers aujourd’hui, se sont construits autour d’un impératif : celui du respect des minorités. Or ce qui se joue là bas, c’est un retour en arrière monstrueux, qui vise à refuser le droit de vivre, oui de vivre, à ceux qui sont différents. Défendre les chrétiens d’Orient, qui assuraient bien souvent le dialogue, la communication, l’échange entre les diverses composantes des sociétés où ils étaient installés, dont les monastères étaient des lieux de rencontre, c’est défendre les peuples d’Orient, et toutes leurs autres minorités.
C’est donc de chacun de nous qu’il s’agit. Nous français, nous européens, nous citoyens du monde libre, quelle que soit votre religion.
Qui sont les partenaires avec qui vous organisez cet événement ?
Nous avons associé l’Anacra, association nationale des anciens combattants et résistants arméniens, avec qui nous travaillons déjà, l’Aemo, association d’entraide aux minorités d’Orient, le Chredo, comité pour les Chrétiens d’Orient, l’AJCF Amitié judéo-chrétienne de France, Sant’Egidio, le Temple protestant de la rue Cortambert, les Eglises d’Auteuil et de Saint Honoré d’Eylau, des congrégations chrétiennes orthodoxes, de nombreuses associations juives, la mairie du 16ème arrondissement en la personne de Claude Goasguen, l’un des premiers à avoir dénoncé ce drame, ou encore Anouar Kbibech, notre si proche ami, président du RMF et vice président du CFCM, qui s’est depuis longtemps déclaré solidaire des chrétiens d’orient.
Mais aussi des personnalités y prendront la parole : Jean François Colosimo, et Alexander Adler, puis quelques grands témoins, Christine Chaillot, Antoine Bagdikian…
La conférence sera clôturée par un moment de prière commune et de recueillement.
Pensez-vous qu¹on a vraiment conscience aujourd¹hui en France du désarroi dans lequel se trouvent les Chrétiens d’Orient ?
Le 27 juillet dernier, j’étais à la 1ère manifestation organisée sur le parvis de notre Dame. Nous étions peu nombreux. Mais c’est là que j’ai vraiment pris conscience de la tragédie des chrétiens d’Orient et des yézidis, On m’a remis, en forme de badge, le noun, qui était une lettre que les sanguinaires traçaient sur la maison des chrétiens (noun étant la première lettre du mot nazaréen, c’est à dire chrétiens), identifiés comme des cibles à éliminer physiquement. Depuis, y a-t-il eu une grande solidarité nationale, en France, une prise de conscience publique ? Hélas très insuffisamment. Car il ne faut pas seulement faire la guerre là-bas. Il faut aussi, ici les accueillir à bras ouverts, quand ils ont fait le choix de quitter leur terre ancestrale, et les soutenir pour ceux qui restent, via les ONG et associations présentes sur le terrain, pour leur faire savoir que nous sommes des millions à leurs côtés.