Entretien avec Nathalie Kosciusko-Morizet.
Avant de déposer au Conseil de Paris un nouveau vœu exigeant la condamnation ferme du mouvement de boycott anti-israélien BDS, la présidente du groupe les Républicains de cette assemblée délibérante s’est entretenue avec l’Arche Magazine. Celle-ci a confié que malgré les pressions dont elle faisait l’objet et malgré l’influence croissante du mouvement au sein des appareils politiques, elle continuerait de s’y opposer. Aussi, la député a appelé la mairie de Paris à clarifier sa position sur ce sujet.
L’Arche : Vous présentez au Conseil de Paris un vœu relatif à la condamnation du BDS, le mouvement de boycott contre les produits israéliens. Qu’attendez-vous de ces discussions ?
Nathalie Kosciusko-Morizet : C’est un combat que nous avions commencé à mener après la polémique qu’avait créé l’événement « Tel-Aviv sur Seine », l’été dernier. Dès septembre, ma famille politique avait formulé un premier vœu au Conseil de Paris, pour demander la condamnation de ce mouvement. Mais après des réactions extrêmement agressives et particulièrement fermes de la part d’élus de gauche, le texte n’a pas été adopté. Le fait est que depuis, l’influence du BDS n’a cessé de s’accroître. Pire, plusieurs manifestations ont eu lieu au sein d’espaces publics. Ces événements ont montré combien le problème s’aggravait et combien la mairie de Paris elle-même ne s’était pas positionnée clairement sur ce sujet. Le Premier ministre Manuel Valls par exemple, s’est exprimé de façon limpide à ce propos, après la commémoration de l’Hyper cacher, le 9 janvier dernier. Ce vœu est l’occasion d’exiger de la municipalité d’en faire de même, de clarifier son discours.
A quels événements faîtes-vous allusion ?
Certains de ces événements se sont passés à la mairie du XIVeme arrondissement, c’est pourquoi, en tant qu’élue de ce territoire, je me sens particulièrement concernée. En décembre par exemple, s’est déroulée dans une salle annexe de cette mairie, une soirée publique sous couvert d’action humanitaire. C’était en fait l’occasion informelle de développer des thèses BDS.
Puis en janvier, il y a eu le conseil d’arrondissement du 14e. A ce moment-là nous déposions pour la seconde fois, un vœu appelant à condamner fermement les initiatives du mouvement BDS. Lors de ces séances de discussions, de nombreux militants avaient pris place dans la salle du Conseil, manifestement invités par la maire du 14em. Trois d’entre eux ont été invités à s’exprimer, et l’ont fait de façon véhémente vis-à-vis de certains de mes collaborateurs.
Pensez-vous que certains militants du BDS usent de l’antisionisme radical pour cacher leurs antisémitisme ?
Je l’ai dit très clairement au mois de janvier au conseil d’arrondissement, et très clairement en septembre au Conseil de Paris, que ce mouvement agressif antisionisme pouvait cacher de l’antisémitisme. Les militants du BDS qui se sont exprimés au conseil d’arrondissement ont eu des réactions très vives et agressives. On a eu, quand même, ce qui n’est pas rien aussi, des élus de gauche qui leur ont donné la parole dans la salle. Ils ont d’ailleurs tous voté contre notre vœu, à l’exception notable d’une adjointe, Olivia Polsky qui a refusé de s’associer au vote « contre » et qui a quitté l’assemblée. La mise en scène qui a permis à des militants de BDS de venir s’exprimer de manière très agressive à l’égard de mes conseillers d’arrondissement n’a fait que prouver combien le sujet dépassait les clivages politiques.
Votre appel sera-t-il entendu cette fois ?
Des indices me laissent penser qu’il y a des avancées dans mon sens et que certains élus commencent à ressentir de la gène à soutenir le BDS, peut-être est-ce le début d’une prise de conscience au sein de la majorité. Des bruits courent selon lesquels les socialistes seraient prêts à aller dans notre sens, et qu’ils s’apprêtent à voter contre BDS. Ce qui est étonnant quand on sait, comme je vous l’ai expliqué, qu’ils ont voté contre notre vœu en septembre et encore au conseil d’arrondissement il y a quinze jours. Qu’est-ce qui aurait fait qu’ils ont changé d’avis aussi brutalement ? Il faudra attendre pour vérifier leur sincérité. Je voudrais être sûre de ne pas voir le BDS rentrer par la fenêtre après être sorti par la porte.
Pensez-vous que certains élus ne voient pas la dangerosité du mouvement BDS ?
Certains de ceux qui soutiennent ce mouvement sont sûrement sincères, ils s’en tiennent aux discours polissés, publics. Le problème du BDS, c’est qu’il y a la partie visible et la partie invisible. Ce qui s’expose à l’extérieur et ce qui se passe entre quatre yeux. Tout à l’heure, j’ai parlé avec un élu socialiste dont je tairai le nom, qui reconnait voir une prolifération d’événements et de manifestations du mouvement BDS dans les mairies d’arrondissement, et cela pas uniquement dans la mairie du XIVe. Cela prend de l’ampleur. La majorité est profondément divisée sur ce point, le sujet reste sensible.