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Musique

Voyage musical à quatre voix

Henri Agnel ensemble – Los Kaminos

Henri Agnel, compositeur, musicien, chercheur et voyageur, travaille depuis 35 ans sur les instruments à cordes, en particulier de la famille des cistres et oud (luth arabe), instruments omniprésents du moyen âge jusqu’au XVIIIe siècle dans les cultures européennes et méditerranéennes. Sa rencontre avec le maître irakien du oud Mounir Bachir ou le percussionniste Djamchid Chemirani, le fait devenir un passionnant messager des musiques traditionnelles orientales, et inscrit son itinéraire de compositeur dans les traditions et modernités de la Méditerranée. Sa carrière de concertiste classique et contemporain à la guitare et à la mandoline le voit croiser l’ensemble « Musique Vivante » composé entre autre de musiciens comme Jean-Pierre Drouet, Michel Portal, Jean-François Jenny-Clarke ou Georges Aperghis. C’est ainsi qu’il participe à de nombreuses créations contemporaines et que plusieurs œuvres sont composées pour et par lui.

Son dernier disque «Los Kaminos» («Les Chemins» en judéo-espagnol), sorti chez « Accords croisés » et qu’il réalise avec son ensemble, nous invite à un voyage musical et poétique à travers les chemins de la musique judéo-espagnole : de l’Espagne au Maroc, de la Turquie jusqu’aux Balkans. Henri Agnel s’entoure de deux chanteuses bulgares: Milena Jeliazkova (soprano) et Milena Roudeva (alto-barytone) qui font partie du collectif «Balkanes» et qui apportent au recueil par leurs couleurs vocales une teinte belle et mystérieuse, et de son fils Idris percussionniste qui porte l’ensemble par des rythmiques vives et incarnées.

Les quatre musiciens-chanteurs nous racontent avec émotion par ce répertoire médiévale et métissé, la richesse de l’héritage des musiques méditerranéennes préférant l’esprit de veillée à la forme pure et muséale. Des mélodies traditionnelles sépharades, comme Hija mia, sonnent d’une si belle manière et ce grâce aux influences à la fois différentes et proches des interprètes. Ces musiques qui ont parcouru frontières et époques viennent aussi résonner avec l’actualité troublée du monde moyen-oriental évoquant les thèmes plus douloureux comme l’exil, l’errance, la persécution politique ou ethnique. Le morceau Notches, notches… vient nous toucher en ce sens, avec ses longs accords d’harmonium, l’emploi du rebec (vièle orientale proche de la lyre) et son chant tellement émouvant qui nous emmène au-delà des mers, des voyages et des tempêtes.

Pour Henri Agnel et ses musiciens, ce répertoire métissé se veut aussi un tendre manifeste en faveur d’une polyphonie des cultures qui a fait et fait encore les richesses de la Méditerranée et qu’ils expriment à travers leurs échanges et leurs jeux. Ce disque, tel un coffre remplis d’étoffes musicales est à découvrir sur scène, comme le 9 février dernier au « Studio de l’Hermitage » où lors d’une soirée à la fois joyeuse et forte, la musique s’est transformée en une fabuleuse danse des voix, des corps et des âmes.