Le meurtre d’Abel par son frère Caïn est de ces sujets qui fascinèrent un siècle, celui de Scarlatti, épris de questions théologiques. Ce premier meurtre qui a engendré l’Humanité, plaçant la figure ambiguë de Caïn dans le rôle du père de la civilisation, est décrit dans le chapitre 4 de la Génèse et rapporte la naissance de Caïn et Abel, leur différence, leur conflit et finalement le meurtre tragique d’Abel.
Après Moses und Aron, le metteur en scène Romeo Castellucci revient à l’Opéra de Paris avec cet oratorio dont il explore la dimension métaphysique, interrogeant la part du Mal dans le projet divin. La musique de Scarlatti évoque le fratricide avec une grande douceur, « comme une leur de la maladie ». Maître du répertoire baroque, René Jacobs a quant à lui contribué à la redécouverte de ces trésors méconnus, parmi lesquels ce rare Primo Omicidio, donné pour la première fois à l’Opéra de Paris.
Parmi les 38 oratorios, cantates sacrées et passions composés par Alessandro Scarlatti, 21 sont parvenus jusqu’à nous. La partition autographe de Il Primo Omicidio est datée 7 janvier 1707. L’oratorio, qui a adopté le style opératique avec arias, récitatifs et la basse continue instrumentale, est tout autant une invention italienne que l’opéra. Mais alors que le sujet de l’opéra est classique et profane, celui de l’oratorio est sacré. La capitale mondiale de l’oratorio fut sans conteste Rome. C’est là que Scarlatti composa la plupart de ses œuvres
appartenant au genre. Il Primo Omicidio, par contre, fut composé à Venise, où Scarlatti séjourna entre 1706 et 1707. Les noms des interprètes ne nous est pas parvenu, pas davantage que le commanditaire. L’œuvre fut probablement créée pendant le Carnaval.
Jusqu’au 23 février 2019, à L’Opéra Garnier.